1 Mai 2012

MEPHISTO

En solidification dirigée d'alliages métalliques, les phénomènes interfaciaux ne peuvent pas être observés en temps réel.

Objectif


Grâce à un diagnostic thermoélectrique utilisant l'effet Seebeck, le dispositif MEPHISTO est capable de recueillir les caractéristiques interfaciales en cours de solidification, telles que la concentration ou encore les courants thermoélectriques locaux,  en temps réel et de façon non perturbatrice.

L'environnement particulier de microgravité permet de s'affranchir des phénomènes de convection thermique, conséquence de l'interaction d'un gradient thermique avec la gravité, donc de mieux comprendre les mécanismes fondamentaux qui interviennent pendant la croissance d'un cristal.

Les thèmes que permettent d'étudier un tel dispositif  sont mutliples:

  • Micro et macro ségrégation dans les alliages binaires
  • Stabilité morphologique à l'interface solide/liquide
  • Croissance cellulaire / dendritique
  • Corrélation entre des variations de gravité ("burns" de la navette) et la température d'interface

Concept Opérationnel

Le concept original de ce dispositif est de coupler une méthode classique de solidification dirigée de type "Bridgman" avec deux types d'effets thermoélectriques : l'effet Seebeck et l'effet Peltier.

Utilisation de l'effet Seebeck

L'effet Seebeck est la production d'un courant électrique dans un circuit fermé composé de plusieurs métaux dont les jonctions sont maintenues à des températures différentes. En circuit ouvert on peut obtenir une tension qui est proportionnelle à l'écart de température entre les deux jonctions. C'est le principe de fonctionnement des thermocouples.

Dans MEPHISTO, on solidifie un alliage en configuration de thermocouple corps A - corps B - corps A, où le corps A est l'alliage à l'état solide et le corps B est l'alliage à l'état liquide. Un système {four froid - four chaud} et {four chaud - four froid} permet d'obtenir cet état. Dans cette configuration on maintient immobile une des deux interfaces solide/liquide ce qui permet de connaître sa température qui correspond à sa température d'équilibre. L'autre interface est déplacée par translation du système {four froid - four chaud}. La tension mesurée aux bornes du creuset permet de calculer la température de l'interface qui se déplace.

Utilisation de l'effet Peltier

L'effet Peltier est l'effet complémentaire de l'effet Seebeck : un courant produit un dégagement de chaleur à la jonction de deux conducteurs différents. Peltier a notamment observé qu'il "est des matériaux qui ne donnent pas seulement une moins grande élévation de température, mais aux soudures desquels il y a un abaissement notable". L'effet Peltier est donc un moyen de réfrigération à la base de nombreuses  applications encore d'actualité de nos jours.

Dans MEPHISTO, on génère un effet Peltier en injectant un courant dans le creuset en cours de solidification, ce qui a pour effet de refroidir l'interface solide/liquide en mouvement et ainsi de "marquer" l'interface solide/liquide, marquage qui peut être observable post mortem par le polissage de l'alliage.

MEPHISTO a été embarqué à quatre reprises à bord de navettes américaines, dont deux campagnes pour le compte de scientifiques français : USMP1 en 1991 et USMP3 en 1996 et deux campagnes pour le compte de scientifiques américains : USMP2 en 1994 et USMP4 en 1997. Chaque campagne avait une durée de l'ordre de deux semaines.

Matériel utilisé

MEPHISTO permet d'accueillir simultanément trois charges par campagne de vol. Les charges sont des creusets cylindriques en quartz de 6mm de diamètre et longs de 850mm, remplis d'un alliage métallique à base d'étain dilué en bismuth (Sn/Bi). La température de fusion est de l'ordre de 230°C à la concentration 1.6% at. Bi.

La charge "Seebeck" permet de recueillir le signal Seebeck à chaque instant. Ce signal donne une indication de la température de l'interface et permet l'étude de la dynamique de solidification en front plan et front cellulaire.

La charge "Peltier" permet l'observation post mortem de la forme de l'interface solide/liquide. Elle contient de plus deux thermocouples du côté fixe pour mesurer la température dans le bain d'alliage liquide.

La charge "Trempe" permet comme son nom l'indique de tremper l'alliage en fin de campagne. La trempe se fait par un déplacement rapide de 19mm du front de solidification dans le puits froid. Il en résulte un refroidissement de l'ordre de 70K/s qui fige le profil de concentration liquide, permettant à posteriori une détermination précise du coefficient de diffusion liquide. Des thermocouples insérés du côté de l'interface mobile permettent de mesurer le gradient thermique appliqué. Une mesure de résistance permet également de suivre la position de l'interface à chaque instant.

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